Scotto, Serge (scénario) & Saint, Emmanuel (dessin et couleur)
Bande dessinée
Paris : Delcourt, 2024, 99 pages, 22.50 €
🙂 Don Camillo en Provence
En France, dans les années ’70, l’exode rural était une réalité bien tangible : les jeunes habitants des villages isolés s’en allaient, attirés par le mirage d’une vie citadine plus « vivante » à leurs yeux. Ils laissaient derrière eux des régions dépourvues de main-d’œuvre et qui s’étiolaient à vue d’œil. C’est pour lutter contre ce phénomène que le maire d’un village provençal décide d’installer en ses murs une colonie de réfugiés cambodgiens. Évidemment, les premiers réflexes de ses administrés envers les nouveaux arrivants relèvent de la méfiance, mais une fois que les cambodgiens ont montré leur âpreté au travail, les quelques troubles du début finissent par disparaître. Seul l’un des villageois résiste et mène la vie dure au maire : Antoine, grand propriétaire terrien, veuf et miné par la mort de son fils en Indochine, n’admet pas l’arrivée des Cambodgiens. Parmi ceux-ci toutefois, il repère un gamin, visiblement orphelin et maltraité par ses compagnons d’infortune. Entre lui et le jeune garçon, une complicité s’installe.
Plaidoyer pour l’intégration et la coexistence
« Des étrangers dans les lavandes » nous a des petits airs du célèbre « Don Camillo » de Giovannino Guareschi (plus connu grâce à la série de films portés par Fernandel), on n’y croise certes pas de curé aussi flamboyant mais les personnages du maire, de l’instituteur et d’Antoine font le boulot question échanges verbaux colorés. Quant au thème du vivre ensemble qui traverse la série précitée, il est ici central. Au travers de quelques péripéties qui parsèment le récit, c’est bien à un plaidoyer pour l’intégration et la coexistencepacifique au-delà des différences que nous invitent Serge Scotto au scénario, et Emmanuel Saint au dessin. Grandes cases, dominance du bleu et des couleurs claires, le trait est généreux, très lisible, même si parfois imprécis ou rapide pour certains visages. Quant au récit, généreux il l’est certes aussi, mais, avouons-le, parfois trop et trop longuement. L’intrigue pèche par manque de resserrement, elle file dans trop de directions et, à contrario, s’appesantit sur d’autres via des bulles et récitatifs trop longs. Beaucoup de bonne volonté donc de la part des auteurs sans doute, qui aurait mérité un travail éditorial plus poussé.