Katsu, Alma ; traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Nadège Dulot
Fantastique
Paris : Sonatine, 2024, 416 pages, 23 €

🙂 La caravane passe

En juin 1846, une caravane d’une petite centaine de personnes prit la route au départ de la Côte Est des États-Unis pour rejoindre la Californie. Plusieurs familles composaient le convoi, de conditions sociales très diverses et plus ou moins bien préparées pour le périple qui les attendait. À priori, elles ne se connaissaient pas et n’avaient aucune raison de faire preuve de solidarité si les conditions venaient à l’exiger. Menée par George Donner dans un premier temps, puis par James Reed dans un second (lorsque Donner montra ses limites dans les situations difficiles), la caravane comptait également d’autres personnages emblématiques, tels Stanton, un célibataire peu sociable, et Bryant, journaliste spécialisé dans les coutumes indiennes. Après une -courte- première partie de voyage sans histoire, la caravane est confrontée à des phénomènes étranges (disparition d’animaux, bruits nocturnes non-identifiés) qui culminent avec la découverte du cadavre d’un des enfants, parfaitement nettoyé de sa chair et dont ne subsistent quasiment que les os. Malgré tout, les chariots reprennent la route, mais très vite des tensions se font jour entre les différents sous-groupes qui la composent. Les phénomènes étranges, eux, ne disparaissent pas et certains pionniers éprouvent de plus en plus la sensation d’être suivis.

On déchante vite

Alléchant pitch n’est-ce pas ? Si vous ajoutez les références servies par l’éditeur (dithyrambiques extraits de presse, issus des meilleurs quotidiens anglo-saxons, faisant eux-mêmes référence à l’inégalable « Terreur »de Dan Simmons), impossible de ne pas être attiré par ce roman de la rentrée, basé sur des faits réels et dû à la plume d’une inconnue : Alma Katsu, dont il s’agit ici de la première traduction française (elle a deux autres romans d’horreur à son actif). Si le pitch et les premières pages possèdent de fait de quoi attirer l’amateur, force nous a été de rapidement déchanter. Premier écueil : la surabondance de personnages. Nous l’avons dit, le convoi est constitué de familles, elles-mêmes composées de maris, d’épouses, d’enfants (dont certains issus de mariages précédents) et de « personnel de maison » et autres conducteurs de chariots. Nombre d’entre eux interviennent selon les situations rencontrées (parfois fort éloignées chronologiquement l’une de l’autre) mais souffrent indubitablement d’une trop faible caractérisation, limitée souvent à leur nom et leur situation familiale. On s’y perd et on n’éprouve que rarement de l’empathie.
Deuxième écueil : les chapitres proposant un « break » dans l’avancement de l’intrigue et qui se focalisent sur le passé de l’un ou l’autre personnage. Toujours consacrés à un épisode douloureux et/ou honteux de la vie sentimentale du dit personnage et qui mettraient celui-ci en danger s’ils venaient à être révélés, ces chapitres deviennent à la longue, à cause de leur côté répétitif, tout simplement lassants, on finit par s’en désintéresser si pas par s’en trouver énervé à cause de leur côté bien-pensant. Troisième écueil : l’intrigue principale (c’est quoi ces phénomènes bizarres ? et ces bruits ? qui mange les humains ?) pas assez principale, débordée par les tensions inter-groupes ou interpersonnelles et par les retours en arrière dont nous parlions ci-dessus. En bref, si son histoire recèle quelques moments plus captivants, « Hurlements » paraît bien trop long, alors qu’il ne compte finalement que 400 pages -à l’inverse de « Terreur » qui en comptait plus de 700 et nous avait captivé du début à la fin.
Nicolas Fanuel

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