Tom Harvey est en galante compagnie à Rome lorsque son portable sonne. Le nom sur l’écran est celui de son ex-beau-père, le peintre Bob Ardlan. Harvey se dit qu’il rappellera…mais deux jours plus tard c’est Elena, son ex-femme qui téléphone : Bob est tombé du balcon de sa chambre, dans sa villa de Tremonte. Son corps a été retrouvé sur les rochers.
Toujours amoureux d’Elena, Harvey abandonne une modeste tournée en tant que saxophoniste de jazz et son boulot alimentaire de guide touristique pour aller la soutenir. Peut-être la reconquérir, qui sait ? Et aussi tenter d’expliquer un détail troublant : Bob a tenté de joindre Harvey un quart d’heure avant de chuter, selon l’heure indiquée sur sa montre brisée. Que voulait-il lui dire, si près de la mort ?
A Tremonte, sorte de rendez-vous de la jet-set internationale, Tom Harvey retrouve Stelia Moon, une écrivaine à succès dont les oeuvres sont tombées en désuétude, et amie de la famille Ardlan. Mark Heargraves, l’agent artistique de Bob, rapplique également, en vue de la montée de cote du peintre décédé. Le tenancier d’une boîte de nuit, un réalisateur et sa jeune et pulpeuse épouse, un couple richissime et leur fille souffrant d’une maladie constituent un microcosme plein de faux-semblants.
Poussé par Stelia (qui y verrait un bon début de roman policier), Harvey s’interroge sur les dernières semaines de Bob. Une jeune fille du village, Carmela, avait été retrouvée morte par Bob un matin sur la plage. Un bain de minuit qui a mal tourné ? Cette découverte avait fortement perturbé le peintre, qui a réalisé un dernier tableau de la scène macabre. Pourquoi ? Le tableau cacherait-il un indice ?
L’hypothèse de l’accident semble de plus en plus improbable. Le meurtre serait plausible, d’autant que chacun trouve un avantage dans la mort d’Ardlan.
A force de fouiner parmi le gratin, Harvey va s’attirer des ennuis, c’est certain.
Polar dans un cadre idyllique
Mikel Santiago, Espagnol de son état, nous offre sur un plateau un cadre idéal en cet été 2020 : villas cossues à flanc de rochers, pontons privés et yachts, routes sinueuses (et dangereuses), … Le décor, photogénique à souhait, est planté. Cela ne fait pas tout, mais ça aide grandement.
Quant à l’intrigue, on y adhère d’emblée. Le lecteur colle aux basques de Tom Harvey, narrateur pour la cause. Soumis aux tourments de la quarantaine et des projets qui ne se sont jamais réalisés, Harvey est un personnage aussi humain qu’attachant.
L’auteur du « Mauvais chemin » (2018) nous balade volontiers à travers différentes pistes. S’il ne perd jamais le nord, certaines coïncidences semblent fort heureuses, mais pas de quoi décrédibiliser l’auteur qui est à la barre. Hypothèses et suspects se succèdent juste avant le dénouement, mais restent toujours plausibles.
« La dernière nuit à Tremore Beach » (2016), un premier roman fantastique qui a valu à son auteur le titre de « Stephen King espagnol » (un titre sans doute galvaudé) a laissé des traces : les rêves réalistes d’Harvey n’apportent rien et ne collent pas à l’intrigue policière, qui se suffit à elle-même.
Rien qui ne puisse gâcher votre plaisir de lecture, rassurez-vous : Tom Harvey et son étrange été sont hautement fréquentables ! Buon viaggio en Italie !