Louviec, près de Saint-Malo. Ce petit village (fictif) d’Ille-et-Vilaine comprend 1223 âmes, dont un descendant de Chateaubriand qui entretient sa ressemblance avec l’illustre écrivain à des fins touristiques.
De Paris, Adamsberg est interpelé par un encart dans le journal sur le meurtre du garde-chasse de Louviec, Gael Leven. Il avait entrevu le type au gabarit digne d’un bahut du cru dans l’auberge du village, alors qu’il bouclait une enquête sur une série de meurtres le mois précédent. La discussion au bar roulait sur le Boiteux, le fantôme du château de Combourg, dont la jambe de bois terrorisait encore les habitants de Louviec. Josselin de Chateaubriand était présent, saisissant de ressemblance avec son aïeul, mais également le Bossu du coin.
Alors que plusieurs indices sur le corps de la victime accusent Josselin de Chateaubriand, le commissaire de Combourg, Matthieu, est déferré de l’enquête au profit de l’intelligent mais obscur Adamsberg. Il faut éviter le scandale de l’arrestation de Chateaubriand.
L’allure lente et les répliques déroutantes d’Adamsberg ne font pas l’unanimité à Louviec, dans un premier temps du moins. D’autant plus que l’excellent travail fourni par les équipes d’Adamsberg et de Matthieu réunies n’empêche pas d’autres meurtres d’être perpétrés. Ca s’échauffe à Paris, et Adamsberg risque sans doute là sa carrière.
Adamsberg, commissaire obscur et déroutant
Six ans après son dernier opus, « Quand sort le recluse », et deux essais inquiets sur le changement climatique, Fred Vargas revient à son personnage fétiche dont il s’agit de la dixième enquête. Les afficionados seront ravis de retrouver le commissaire lunaire, cette fois sans son fidèle commandant Danglard, resté à Paris.
Personnage singulier et excentrique, Adamsberg impressionne toujours avec sa prodigieuse mémoire visuelle etses déductions en apparence fantasques.
Fred Vargas plante un décor idyllique, fait de mystérieuses ruelles, de rivière où faire semblant de pêcher et de forêt où flâner. Sans compter un dolmen, dont s’emparera Adamsberg pour tenter de relier entre elles les idées qui fusent dans son subconscient. L’archéozoologue de formation sait renouveler sa panoplie de personnages secondaires attachants. Citons Johan l’aubergiste, qui n’est pas insensible aux charmes que beaucoup jugeraient improbables du lieutenant Violette Retancourt.
L’enquête en elle-même est dense, se complexifiant au fil du temps. On croit tenir le meurtrier à la moitié du livre, mais c’est sans compter détails, fausses pistes et circonvolutions. De trop nombreux détours perdent un peu le lecteur dans les 100 dernières pages. Mais l’ensemble reste admirable, tout comme l’œuvre romanesque de l’auteure.