Makyo (scénario) ; Sicomoro, Eugenio (dessin) ; couleurs Marco Ferraccioni
Bande dessinée
Paris : Delcourt, 2025, 55 pages, 15,95 €

🙂 🙂 La beauté et l’intelligence du diable

En 1840, dans le nord-est de l’Arizona, une tribu d’indiens Hopis fût massacrée par des soldats de l’armée américaine. Un an plus tard, dans une ferme isolée à quelques heures du fort dont provenaient les auteurs du raid, Kate reçoit la visite de deux hommes. Ceux-ci lui remettent, au nom du commandant du fort, un bébé indien, qu’elle est chargée d’élever. La jeune femme vit seule avec sa fille de moins de 10 ans, elle déteste les indiens et, parfois, elle se prostitue pour pouvoir nourrir sa gamine. Mais bon, en compensation, les deux hommes lui ont amené une vache, cadeau du commandant du fort.
Le temps passe et l’enfant, nommé Dead Smile, semble protégé par les Hopis rescapés du raid qui parfois rendent visite à Kate. Dans leur village à eux, grandit un autre enfant du même âge, mais à la peau blanche et grêlée de taches rouges, nommé Mongwa. Selon le chef de la tribu, l’esprit de Mongwa est « pur et se flétrit comme sa peau, au contact de ce monde ». À l’inverse de Dead Smile qui, si l’on en croit Kate, « a la beauté et l’intelligence du diable ».

Une intrigue de bruit et de fureur

Mongwa/Dead Smile : les deux faces d’une même pièce, à l’image de la nation américaine de l’époque, composée d’indiens et de blancs ? Avec cet album aux allures de western mystique, le prolifique scénariste Makyo retrouve son complice Sycomoro (ils ont signé ensemble les séries « La porte du ciel » et « Lumière froide ») pour nous livrer l’intrigante histoire d’une fratrie physiquement séparée mais toujours vivace par l’esprit ; deux frères que tout sépare et qui pourtant se réunissent parfois, comme aimantés l’un vers l’autre par des forces surnaturelles. Alors que Mongwa fait pâle figure au cœur de la tribu, Dead Smile développe de véritables talents pour l’action et la violence, qu’il n’hésite pas à utiliser si l’on s’en prend à sa famille adoptive. L’indien violent, le blanc pacifique : Makyo aime à ridiculiser les clichés et à injecter des pointes d’humour au milieu d’une intrigue de bruit et de fureur. Le trait réaliste de Sicomoro, dont certaines cases, en accord avec l’intrigue, sont composées à part égales d’ombre et de lumière, nous rappelle tantôt JF et Maryse Charles, tantôt Derib, tantôt Servais, que du beau monde ! Très lisible et juste, voilà une bd pour adultes qui ne manque ni d’attrait ni d’originalité. Suite et fin au deuxième épisode, la série étant annoncée comme un diptyque par son éditeur. On a aimé !
Nicolas Fanuel

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