Jacques Tramson, dit Tram, est éducateur de rue à Barbès, lieu de tous les commerces. Son job : détourner les jeunes en maraude dans son secteur de la tôle. Et les choses peuvent vite mal tourner : « La filière à Barbès, elle est simple : ça commence par l’ennui, puis le shit, ensuite la coke et le casse pour finir. Seulement après le casse, une fois sur deux, il y a la taule. » Dans cette liste manque le tapin, qui menace les beurettes désœuvrées. Là est tout le quotidien de Tram : anticiper les choses un maximum. Quitte à prendre quelques libertés avec la Loi.
Trois romans homogènes réunis en un volume
« Barbès trilogie », c’est donc trois romans parus sur deux décennies : « Rebelles de la nuit » (Le Mascaret, 1987), « La porte de derrière » Série noire, 1993), « Quand la ville mord » (La Branche/Suite noire, 2006), parus entre 1987 et 2006. Série noire a eu la bonne idée de les réunir en un seul volume, 368 pages pour le tout additionné.
Tramson a besoin d’un break, de vacances. « Rares sont les éducs qui peuvent enfiler plus de trois années à Barbès. Là-bas c’est la folie, tellement la pression est forte. Un moment, vaut mieux trouver un poste en banlieue ou carrément changer de boulot. »
Partager le quotidien de ces éducateurs de rue, de ces dealers et petites frappes est immersif, grâce à la plume minimaliste et efficace de Marc Villard. Point d’emphase, de « c’est noir ou blanc », mais des nuances semblables à celles qu’offrent la Vie, de l’empathie. On est loin des romans de gare, de scènes de cow-boys de banlieue. Mais de beaux personnages, pour lesquels, malgré leurs travers – qui ne sont que débrouilles dans un monde brut – le lecteur s’inquiète, voire se prend d’affection. Ils traversent les trois romans en laissant parfois poindre une lueur d’espoir sur leur avenir que l’on espère meilleur.
L’extrait : « La voiture bleue s’engouffra à toute vitesse dans la rue Caulaincourt. Les deux véhicules parvinrent ainsi place Constantin-Pecqueur où une dizaine de touristes allemands se baguenaudaient en toute décontraction. Les bolides semèrent la panique au sein de la volaille teutonne qui se plaqua à l’unisson contre la carrosserie de son Pullman. »