Maynard, Joyce ; traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Florence Lévy-Paoloni
Littérature générale
Paris : 10/18, 2022, 595 pages, 9,60 €
🙂 🙂 🙂 De la construction d’une famille à l’écroulement d’un rêve
Auteure de livres pour enfants à succès, Eleanor achète une ferme dans le New Hampshire. Elle a vingt ans, et n’a aucune famille. L’endroit est isolé, connecté à la nature ; les plus proches voisins sont à un kilomètre.
Au cours d’une exposition d’artisanat, Eleanor rencontre Cam – Cameron – un grand homme roux, à l’esprit libreet au corps séduisant. Il parle d’emblée de fonder une famille, et c’est ce qu’ils feront, rapidement : trois enfants sont mis au monde dans la ferme : Alison, une enfant grave, Ursula, l’optimiste rassembleuse, et Toby, petit garçon roux et rêveur.
Eleanor est une mère comblée, elle qui n’a pas été désirée par ses parents et était laissée en marge de leur amour. Pas de ça à la ferme : rien n’est trop beau pour les enfants, desquels elle tient à éloigner chagrins et soucis. Sa famille, c’est son œuvre d’art. Quitte à se sacrifier sans cesse, jusqu’à l’abnégation.
Seule ombre au tableau : Cam ne contribue pas aux rentrées d’argent, et ne s’en soucie guère, prenant la vie comme elle vient, sans penser au lendemain.
Jusqu’au jour où survient un drame, touchant la famille en plein cœur. Dès lors, plus rien ne sera comme avant.
Roman sur le pardon : le demander et l’accorder
Quel tourbillon de vie que celui où nous emmène Joyce Maynard ! Elle retrace l’histoire sur cinq décennies d’une femme qui rêvait de construire une famille solide et unique, la sienne. Joyce Maynard a-t-elle puisé dans son expérience familiale pour faire vivre de façon aussi aboutie la vie d’Eleanor ? L’auteure de « Prête à tout » s’en défend, arguant que plus l’écrivain fait bien son travail, plus les scènes et évènements paraissent réalistes. C’est ainsi que Joyce Maynard reprend quelques-uns de ses thèmes récurrents : le foyer, le fait de fonder une famille, l’expérience difficile d’un divorce, pour les parents ou pour les enfants.
Eleanor en oublie d’être femme, de définir quels autres objectifs de vie poursuivre. L’aspect financier excepté, elle ne peut que penser à la journée en cours.
Mais à vouloir sans cesse que tout soit parfait, Eleanor se retrouve souvent sur le fil, en route vers Crazyland(comprenez le pétage de plomb).
A contrario, il y a l’aisance de Cam à évoluer dans la vie, malgré les épisodes difficiles, esquivant les problèmes. Toujours, ce grand mari dégingandé attend la joie nouvelle qui remplacera le chagrin.
Joyce Maynard nous livre une intrigue minutieuse, brassant de (parfois trop) nombreux thèmes sociétaux comme la violence faite aux femmes, le SIDA, l’identité sexuelle.
« Où vivaient les gens heureux » a reçu le Grand prix de la littérature américaine 2021.