Phillips, Sean (scénario) ; Brubaker, Ed (dessin)
Bande dessinée
Paris : Delcourt, 2024, 144 pages, 18.50 €

🙂 🙂 Fausses dénonciations, vrais cinglés

Natalie Burns est enquêtrice privée, spécialisée dans la recherche et la récupération de personnes embrigadées dans une secte. Inconsciemment peut-être, son passé l’a-t-il guidé vers cette profession.
Dans les années’80, aux Etats-Unis, une vague de panique envers tout ce qui pouvait s’apparenter à du satanisme s’était emparée de la population. Nombreux furent ceux qui dénoncèrent ainsi des pseudo-groupes adeptes de magie noire, d’enlèvement d’enfants et de rituels sanglants, toujours teintés d’abus sexuels. Partout, on voyait et on signalait à la police des camionnettes blanches rôdant dans les faubourgs, partout on parlait de souterrains secrets menant à des salles de torture. Natalie fût l’une des enfants qui affirma être victime d’un groupe d’abuseurs. Avec cinq autres gosses (ils furent surnommés les Six de Satan), elle réussit, par la seule force de sa parole enfantine et sans aucune preuve, à faire condamner des personnes totalement innocentes, dont certaines, simples éducatrices, finirent par se suicider.
Contactée par l’agent West du FBI, Natalie se rend compte que cette histoire ne semble pas terminée, puisque 3 membres du fameux groupe des Six ont, en quelques mois, connu une fin violente. Elle décide de venir en aide à West, ce qui ne manquera pas de raviver les souvenirs de son enfance traumatisée, de réanimer son sentiment de culpabilité et… la placera dans l’objectif d’une bande de véritables allumés.

Sectes et complots

Ed Brubaker et Sean Phillips sont incontestablement deux pointures du Comics made in USA. Nous avions dit ici tout le bien que nous pensions de « Pulp », une œuvre noire sortie en 2021. Parmi leurs autres séries emblématiques, citons « Reckless », « Criminal », « Kill or be killed » ou encore « Fatale ». Dans cette « Maison des Impies », on retrouve ce qui fait le succès des œuvres des deux compères : une intrigue solide, tortueuse mais aisée à comprendre, où la psychologie des personnages se révèle aussi dense que les scènes d’action pure tombent toujours à point, le tout mis en scène par le trait précis et dynamique de Phillips. Avec ce nouvel opus, et sur fond d’enquête policière aux relents complotistes et sectaires, les deux auteurs nous plongent avec brio dans l’ambiance délétère d’une chasse aux sorcières moderne (les années ’80, ce n’est pas si loin) et démontent les mécanismes d’un aveuglement collectif (les fausses dénonciations des enfants rappellent des films tels que « Les risques du métier » et, plus récemment, « Pas de vagues »). Un suspense intelligent, une intrigue bien menée, des auteurs qui respectent leurs lecteurs.
Nicolas Fanuel

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