Pulp

Brubaker, Ed (scénario) ; Phillips, Sean (dessin); couleur de Jacob Phillips; traduit par Doug Headline
Bande dessinée
Paris : Delcourt, 2021, 70 pages, 12 € (Contrebande)

🙂 🙂 🙂 Ressortir les armes

New-York, années ’30. Auteur de « pulps », Max Winter puise dans sa propre biographie pour rédiger des westerns que son éditeur lui rémunère de plus en plus chichement. Pour Max, elles ne sont pas si loin, ces années où les différends se réglaient au Colt et où on pouvait espérer refaire sa vie honnêtement en franchissant une ou deux frontières d’état. À présent, vieilli et soumis au bon vouloir d’un éditeur contre lequel il n’ose se rebeller, Max, l’ancien cow-boy téméraire n’arrive même pas à se défendre lorsqu’il est harcelé par des petites frappes dans le métro. Ruiné, humilié, découragé et écœuré, il en vient à imaginer une solution « à l’ancienne », histoire de se refaire financièrement mais aussi de redorer son égo en berne.

Un one-shot soigné

Septante pages de bande dessinée -ou plutôt de pulp en bande dessinée- tout simplement parfaites. Bon sang ne saurait mentir : le trait de Phillips relève bien du plus pur style des comics américains. Il évite toutefois ses dérives les plus régulières : chez lui, les personnages sont aisément reconnaissables, les clair-obscur apportent un véritable plus au récit (plutôt que de camoufler les lacunes du dessinateur) et à la beauté des cases. Peu nombreuses les cases d’ailleurs, et parfaitement distinctes les unes des autres (pas de pleines pages consacrées à de nébuleuses scènes d’action ici) ce qui permet une compréhension immédiate du scénario précis et crédible de Brubaker. Les allers-retours entre le passé western et le présent années ’30 sont habilement signifiés par un jeu sur la netteté et la couleur des cases. L’ambiance est au drame, au pur roman noir et ce ne sont pas les fréquentes allusions à la montée du nazisme en Europe qui égaieront l’ensemble. Le personnage de Max, vieux tigre attaché à des valeurs en perdition, s’avère attachant et, même si l’on ne doute pas un instant que les auteurs ne le ménageront pas, on ne peut s’empêcher d’espérer le voir une dernière fois sortir ses griffes et mettre les méchants au tapis. Un one-shot soigné, à l’intriguedense et poignante qui illustre habilement le basculement entre deux époques, servi par un trait net et précis : une œuvre qui ne se moque pas de ses lecteurs, bravo!
Nicolas Fanuel

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Fill out this field
Fill out this field
Veuillez saisir une adresse de messagerie valide.
You need to agree with the terms to proceed