Elévation

King, Stephen; traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Michel Pagel; illustrations Mark Edward Geyer
Fantastique
Paris : Le Livre de Poche, 2019, 157 pages, 6.90 €

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La surprise du format

Un livre de Stephen King au format poche qui tient vraiment dans la poche ? Il faut remonter aux épisodes isolés de “la Ligne verte”, chez Librio (1) ! Et encore, la hauteur des volumes dépassait !
“Elévation” n’est pas à proprement parler un roman. On parle plutôt de novella, c’est-à-dire un récit plus long qu’une nouvelle, à l’instar de celles qui ont été réunies dans le recueil “Différentes saisons”.
Il y a gros à parier que cette histoire sera, un jour, intégrée dans un volume plus grand. Mais tant qu’à faire du flouze, autant créer le buzz en publiant sans attendre cet opus.
Nous voici donc en présence d’un opuscule aéré et illustré, dont l’un des points d’intérêt est qu’il nous ramène à Castle Rock, la ville fétiche de l’auteur, précédemment rayée de la carte dans l’énorme et génial “Bazaar”.

La surprise de l’intrigue

Dès les premières pages d’“Elevation”,on se dit qu’on tient là une nouvelle histoire pleinement fantastique : Scott Carey se rend compte que, jour après jour, et alors que sa physionomie ne diffère pas, il perd du poids. Rappelons que le poids peut varier selon la force d’attraction (on est plus léger sur la Lune que sur la Terre) mais rien ne pourrait expliquer que ce phénomène se produise sur notre planète pour une seule personne.
On pense alors immédiatement au savoureux “La Peau sur les os”(vous reprendriez bien une part de tourte gitane ?…) dans lequel un homme perdait poids et masse suite à une malédiction. Mais “Elévation”prend rapidement ses distances avec ce chef-d’oeuvre signé Richard Bachman pour nous proposer une aventure plus superficielle, bien que toujours attachante.
Scott Carey ne maigrit donc pas mais semble peu à peu échapper aux lois de la pesanteur. Son médecin ne peut rien pour lui et l’homme comprend qu’à force de décliner de la sorte, il finira par perdre complètement le contact avec le sol. Il s’élèvera donc, d’où le titre du livre.

La surprise de la bifurcation

Comme à son habitude récente, King ne va pas chercher une explication au phénomène. A la place, il va nous entraîner dans une histoire parallèle mettant en scène deux voisines lesbiennes (Deirdre la forte tête et Patsy l’effacée) dont l’établissement culinaire peine à démarrer, souffrant de tous les “on-dit” et stéréotypes rampants. Scott déteste la discrimination et il aimerait pouvoir venir en aide à ces dames. Or il se fait que leur chien a pris l’habitude de déposer impunément sur la pelouse de Scott des “mines” odorantes. La relation tendue que Scott entretient avec Deirdre ne semble pouvoir déboucher sur aucune solution durable.
Alors, Scott lui propose un pari : la célèbre course à pieds de Castle Rock, “le trot des dindes” sera l’occasion de poser de nouvelles bases. Si Deirdre gagne la course – et elle en est tout à fait capable, vu son passé de joggeuse invétérée – Scott acceptera que le chien continue à oublier ses déjections sur sa pelouse. Dans le cas où Scott viendrait à gagner le trot – et il en est tout à fait capable vu le pouvoir dont il bénéficie qui devrait lui permettre de “survoler” l’obstacle – Deirdre et sa compagne accepteraient de partager un repas végétarien à son domicile…et d’apprendre à mieux le connaître pour mieux le considérer.
Quelle sera l’issue de la course ?
Et qu’adviendra-t-il de Scott ?

La surprise du Chef

King clôt peu à peu son ouvrage dans un déversement de bons sentiments et d’humanité sirupeuse. Condamnant son personnage à une fin prévisible, il donne l’impression de bâcler quelque peu son sujet. A cause de la taille réduite du livre, on peine à s’attacher aux protagonistes et la relativement longue description des événements survenant au cours de la course à pied (on pense un moment à “Marche ou crève” – un autre Bachman-  les exécutions sommaires en moins) achève de nous convaincre qu’il s’agit là du coeur du récit et que l’élément fantastique n’est qu’un prétexte pour habiller une histoire somme toute anecdotique.
Qu’à celà ne tienne, “Elévation” se lit avec plaisir, amusement, enthousiasme car le talent de l’auteur – et du traducteur, l’excellent Michel Pagel – parvient quand même à donner à cette oeuvrette assez de saveur pour induire une lecture toute satisfaisante.
Le prochain livre de Stephen King, attendu pour l’automne aux States, s’intitulera “The Institute”. Il y sera question de manipulations mentales. D’ici sa parution courant 2020 (voire ‘21), c’est surtout avec le cinéma – et dans une moindre mesure la télévision – que les amateurs du Maître de Bangor devront ronger leur frein. On annonce pas moins de cinq nouveaux projets.
King a toujours la cote.
  1. on exclut le récent “Gwendy et la boîte à boutons” qui était une collaboration avec Richard Chizmar, et “Plein gaz”, écrit à quatre mains avec Joe Hill.
Eric Albert

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