Howard, Catherine Ryan; traduit de l’anglais (Irlande) par Sebastian Danchin
Policier & Thriller
Paris : Archipel, 2025, 389 pages, 23 €
🙂 🙂 🙂 Farce à traque
Eve Black a survécu au massacre de sa famille. Elle vit depuis ses douze ans avec le traumatisme de ce souvenir. Pour tenter de s’en libérer, elle accepte de coucher son expérience sur le papier avec la probabilité, aussi mince qu’elle soit, que l’auteur de la tuerie tombe sur ce livre et commette l’irréparable erreur de vouloir la supprimer pour garantir son anonymat. Car, dans ce livre, avec l’aide d’un policier de l’époque (une « garda », car nous sommes en Irlande), elle revient sur les différents meurtres attribués au mystérieux tueur en série appelé « Le Courant d’air ». Un être pervers et violent qui avait l’habitude d’approcher ses futures victimes et même de visiter leur lieu de vie avant de passer à l’acte. Eve prétend détenir les clefs qui pourrait déboucher sur l’arrestation de l’assassin, bien des années après ses actes, alors qu’aujourd’hui, il doit profiter d’une vie rangée.
Jim Doyle est ce tueur. Lui même ancien garda, il occupe à présent un poste de surveillant de supermarché. Et, bien entendu, il est intrigué par ce livre qui arbore son surnom, en vitrine d’une librairie.
Un jeu du chat et de la souris
Catherine Ryan Howard est l’auteure de huit suspenses qui l’ont propulsée en tête des ventes en Irlande. Avec celui-ci, elle entre dans la sphère francophone de manière fracassante. Car, s’il s’agit d’un enième livre mettant en scène un tueur en série, le traitement s’avère original et très addictif. Entre retours dans le passé, descriptions glauques, analyse fine de la psychologie des personnages – dont on partage les pensées les plus noires ou intimes – le récit s’étend, se répand au fil d’un indécrottable suspense, davantage alimenté par la succession de courts chapitres haletants.
A la manière d’un épisode de Columbo, le lecteur sait dès le départ, l’identité du tueur. Le jeu du chat et de la souris que se livrent le meurtrier et sa survivante appartient à la meilleure veine du genre. Le texte du roman navigue entre extraits du livre de Eve Black, lu par le tueur, et les tentatives de celui-ci pour approcher sa victime. C’est tout un jeu de manipulation, de mensonges et de provocations qui tient le lecteur en haleine jusqu’à un dénouement étonnant – quoiqu’un peu téléphoné pour qui se sera livré à une lecture réflexive.
La qualité de l’histoire ne manquera cependant pas de souffrir de la pauvreté graphique du livre en tant qu’objet : illustration minimaliste lambda, habillage blanc crème passe-partout et surtout ce titre « Le Courant d’air », peu attractif (1). L’acheteur risque malheureusement de passer à côté du pavé et ce serait dommage. L’habit ne fait pas le moine, dit-on. Ici, je considère que le contenant dessert le contenu.
Qu’à cela ne tienne, Encre Noire vous le dit, achetez ce livre les yeux fermés car une fois la lecture commencée, vous ne pourrez certainement plus le faire.
(1) le titre original « The nothing man » possède une aura autrement addictive