Consumée

Crane, Antonia ; traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Michael Belano
Littérature générale
Paris : 10/18, 2023, 310 pages, 8.60 €

🙂 🙂 🙂 Une voix derrière la vitre

Tout juste débarquée de sa campagne, la jeune Antonia Crane, 22 ans, devient strip-teaseuse à San Francisco. Arrivée là presque par provocation, en combattante lesbienne féministe, elle devient vite accro à l’argent facile et au regard des hommes. Mais quand cette ancienne boulimique sujette aux addictions tente de reprendre le contrôle de sa vie, sa mère tombe malade. Pour payer ses soins, Antonia doit remonter sur scène, voire aller plus loin encore, quitte à risquer la prison… De San Francisco à Los Angeles en passant par La Nouvelle-Orléans, Antonia Crane dépeint l’industrie du sexe, sa face sombre, mais aussi la solidarité qui s’y déploie. Tour à tour Stevie, Violet, Candy ou Lolita, c’est cachée derrière des pseudonymes aguicheurs qu’elle explore les tréfonds du désir humain. Et appréhende la solitude qui tenaille ses clients autant qu’elle. Porté par un regard tendre et sans fard, ce roman autobiographique raconte l’histoire d’une fille prête à tout pour sauver sa mère, et d’une femme bien décidée à construire elle-même sa liberté, et à s’affranchir jusqu’à s’accepter enfin.

Roman autobiographique

Sujets très courants de la littérature, le striptease et la prostitution font partie intégrante de ce roman. Mais cette fois ci, on ne peut pas être au plus proche de la réalité, au cœur du monde de la nuit car il s’agit ici d’un roman autobiographique d’une professionnelle du sexe.
Ce roman est celui d’une femme qui se lance dans une activité de prime abord légère et glamour : l’effeuillage… mais la réalité est beaucoup moins joyeuse car très vite l’autrice découvre un tout autre monde.
Antonia découvre en en effet un monde où son corps devient objet, utilisé par des femmes et des hommes en quête simplement de compagnie, de tendresse, voire de désirs charnels jusqu’au bas fond de la perversité, le tout arrosé d’alcool, de drogue et d’antidouleur.
« Je suis devenue un monstre. Hystérique. Hors-la-loi. Je titubais sur l’arête déchiquetée qui sépare la destruction de la rédemption. J’étais anorexique, junkie, clodo, une traînée ambulante, une bisexuelle accro aux gouines. »
Mais un monde également où elle se sent forte, désirée, un monde solidaire, un monde où elle a sa place, ou elle trouve l’aide et le soutien mutuel de ses pairs.
La richesse du récit est de ne pas focaliser seulement sur la vie et les déboires d’une travailleuse du sexe, mais d’aborder également les conditions de travail des professionnels du sexe, leurs droits face à des patrons qui imposent autorité et précarité; avec comme solution la création d’un syndicat.
Aujourd’hui, Antonia Crane, âgée de 53 ans, se définit toujours comme travailleuse du sexe. Grande activiste des droits des prostituées, elle crée en 2018 le « Soldiers of pole » un mouvement syndical qui œuvre pour la syndicalisation et la décriminalisation des travailleurs et travailleuses du sexe. Elle est également scénariste et écrit des articles dans de nombreux magazines. De plus, elle donne des cours d’écriture à l’université de UCLA. « Consumée » est son premier roman, sorti en 2017 aux États-Unis.
Pierre-Emmanuel Mullier

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