Mort en pleine mer : et autres enquêtes du commissaire Montalbano

Camilleri, Andrea ; traduit de l’italien (Sicile) par Serge Quadruppani
Policier & Thriller
Paris : Fleuve Noir, 301 pages, 19.90 €

🙂 🙂 🙂 Les clés de Vigata

C’est toujours avec regret que je referme un Montalbano. C’est le genre de livre dont je ne voudrais jamais voir la fin. Et j’ai peut-être davantage de regret pour celui-ci, sans doute parce que quatre manuscrits seulement restent à paraître et à être traduits en français. En effet, Andrea Camilleri nous a quittés en juillet 2019, à l’âge vénérable de 93 ans. Ce n’est cependant pas le premier que je découvre depuis son décès. Le précédent volume, « L’autre bout du fil », était d’ailleurs le premier que l’auteur, devenu aveugle, avait dicté à son assistante. Sachez aussi qu’il avait déjà imaginé et écrit la dernière enquête de son inspecteur fétiche il y a quelques années, en faisant promettre à sa maison d’édition de ne le publier qu’après sa mort. Nous découvrirons donc « Riccardino », dernier opus, dans « quelques temps » (paru en italien, traduit en anglais).

Une pittoresque galerie de personnages

« Mort en pleine mer » n’est pas un roman mais un recueil de nouvelles dont toutes les histoires se déroulent dans les années ’80. On y retrouve un commissaire plus jeune (donc moins tracassé par son âge) mais déjà bougon, râleur, amateur de bonne cuisine et pas toujours respectueux des procédures. La pittoresque galerie de personnages qui l’entoure est bien présente : Mimi et Fazio, l’irascible docteur Pasquano, l’incomparable agent gaffeur Catarella, sa femme de ménage Adelina (et sa cuisine qui fait saliver), sa fiancée génoise Livia, source de disputes vespérales toujours amusantes à anticiper … Tout ce petit monde évolue avec une joyeuse fougue méditerranéenne mais avec en toile de fond la tentative d’assassinat du pape Jean-Paul II, les crimes perpétrés par la mafia, l’exploitation sexuelle de filles provenant des pays de l’est et autres faits de société que Camilleri s’est toujours plu à dénoncer. Les amoureux de Montalbano y trouveront la réponse aux questions qu’ils se posaient au fur et à mesure des enquêtes précédentes, comme, par exemple, le pourquoi de l’antipathie réciproque de Livia pour Adelina. Ou encore l’origine du trousseau de clés qu’il utilise pour ses perquisitions hors normes ainsi que l’explication de son irrespect chronique de certaines procédures.

De l’italien « sicilianisé »

Il est impensable de parler des écrits d’Andrea Camilleri sans évoquer son traducteur, Serge Quadruppani, qui a su créer à partir de cette langue toute particulière qu’il décrit lui-même comme de l’italien « sicilianisé », le « Camillerese », fait de tournures syntaxiques inusitées et de régionalismes dont il parsème son texte en français, laissant au contexte le soin de vous en faire comprendre le sens. En préface, on pourra lire l’hommage du traducteur à son auteur. Il y rédige une lettre ouverte en s’adressant au personnage emblématique, « Caro Montalbano », lisez « Cher Montalbano ». En huit pages, il témoigne de son immense respect pour cet auteur qu’il a traduit pendant vingt ans. Et c’est très émouvant. Si, comme moi, vous adorez Andrea Camilleri, ne ratez ce volume sous aucun prétexte. C’est une somme, un hommage, un guide. C’est enivrant …
Bernadette Agostini

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