Red Room : Volume 1 : Le réseau antisocial

Piskor, Ed
Bande dessinée
Paris : Delcourt, 2022, 208 pages, 23.95 €

🙁 Abjection, votre horreur (bis repetita (1))

On a beau avoir l’esprit ouvert ; on a beau se croire résistant à l’horreur absolue ; on a beau se convaincre (peut-être à tort!) qu’il ne s’agit que de fiction…Désolé mais ce roman graphique est tout simplement insoutenable !
Les Red Rooms, ce sont ces sites internet cachés dans le Dark Web dans lesquels des pervers de la pire espèce proposent, contre cryptomonnaies, des vidéos de torture et de mise à mort de quidams humains. C’est une évolution (ou plutôt une régression) des snuff-movies qui hantaient les derniers tiroirs des vidéothèques des années ‘80 et qui, pour la plupart, relevaient du « fake ».
Cédric Sire, dans son dernier roman « La Saignée », exploite le même sujet, donnant au thème de cette bd une sorte de légitimité laissant à penser que oui, ces red rooms existent vraiment, oui des personnes – souvent des perdus de la société – sont véritablement mises à mort selon des scénarios où la cruauté et la négation même de l’être humain tiennent le haut du pavé !

Délectation évidente

Ed Piskor est connu pour ne pas faire dans la dentelle mais pour cette nouvelle série prévue en trois volumes, il dépasse toutes les bornes de la retenue, de la bienséance et de la folie.
Composé de plusieurs historiettes entrelacées, « Le réseau antisocial » dresse la carte panoramique du sujet en présentant succinctement divers représentants de l’art de la souffrance infligée, laissant la majorité des pages exposer avec une délectation évidente toute l’inspiration morbide, violente et organique de l’auteur : étirements par crochets, énucléations, libérations d’intestins, coupes anatomiques, décapitations, j’en passe et des pires.
A la longue, c’est-à-dire au bout de vingt pages, la nausée, le dégoût et la vision permanente de l’horreur l’emportent sur le fond de critique sociale que l’auteur prétend vouloir exprimer.
« Trop is te veel »(2), dit-on chez nous. Cinq autres pays ont déjà refusé de diffuser cette débauche de chair sacrifiée. Sans aller jusqu’à dire que la France aurait du faire de même (la sacro-sainte liberté d’expression), la plus grande prudence est recommandée vis-à-vis des lecteurs potentiels.
(1) titre déjà utilisé pour une chronique datant de l’époque révolue d’Encre Noire en version papier
(2) : « te veel », en néerlandais, deuxième langue nationale de la Belgique, signifie « trop »
Eric Albert

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