Harris, Robert J. ; traduit de l’anglais par Natalie Zimmermann
Science-fiction
Paris : Belfond, 2021, 352 pages, 21 €
🙂 Mise en garde
Ce qui est le plus remarquable dans ce roman, c’est son début. C’est un livre que l’on achète parce qu’il semble être fait de péripéties religieuses se déroulant dans une période post Moyen Âge tardif en Angleterre. Une fois que vous êtes confortablement assis, les premières pages semblent le confirmer … jusqu’à la page 33. Et là, tout chavire. Votre cerveau comprend enfin pourquoi quelques termes l’ont déstabilisé et dans quoi il est réellement entraîné : un récit post apocalyptique. De la science-fiction, en clair. Avec, en toile de fond, l’effondrement d’une civilisation moderne sur-digitalisée.
Le retour de l’Inquisition
On suit donc les tribulations du Père Christopher Fairfax dans une société frustre, peu développée, pas si éloignée que ça des conditions de vie qui caractérisaient le millésime 1464 dans la vraie histoire de l’humanité. Le tout est sévèrement régenté par une théocratie agressive, restrictive et paranoïaque qui n’a de cesse de traquer tout qui s’écarte des règles édictées. D’ailleurs, l’Inquisition est de retour … Le simple fait de posséder un artéfact des temps honnis est passible des pires châtiments. Envoyé dans un village isolé du bout de l’Angleterre pour célébrer les funérailles du père Lacy, Fairfax découvre que le contexte est beaucoup plus dangereux que prévu. Indubitablement, le père Lacy pouvait être catalogué « hérétique ». Le roman s’engage alors dans le récit de ses investigations et des effets que tout ce remue-ménage va provoquer.
Une excellente idée qui part en capilotade
Annoncé comme cela, le livre est très prometteur et le reste pendant son premier tiers. Et puis, il ne décolle pas. Le style est inexplicablement quelconque, l’histoire convenue et prévisible et les scènes parfois à la limite de la littérature pour adolescents. C’est plat, plutôt ennuyeux et seule l’envie de connaître le dénouement donne le courage d’aller au bout de l’aventure. L’auteur revient à une forme plus mature et autrement mieux torchée dans les quatre derniers chapitres … pour nous abandonner dans un final tronqué. La seule explication étant qu’une suite a été programmée. Sinon, on peut penser qu’il se débarrasse de son récit, lui-même pas du tout convaincu par ce qui a précédé.
« Le second sommeil » est l’exemple typique de l’excellente idée qui part en capilotade. Ce n’est en tout cas pas lui qui détrônera le chef-d’œuvre de Walter M. Miller, « Un cantique pour Leibowitz » (1960), basé sur la même thématique. Et pour ceux qui s’étonneraient que Robert Harris se risque sur les territoires de la science-fiction, rappelons qu’il est l’auteur d’un remarquable roman uchronique : « Fatherland » (1992). Dommage.