Ce roman est mon premier contact avec cette auteure islandaise. Née en 1963, elle est ingénieure civile et mène parallèlement sa carrière d’écrivaine. Outre ses romans policiers (une petite quinzaine à ce jour, dont la moitié non traduite), elle écrit aussi des livres pour l’enfance et la jeunesse. Ce livre est le deuxième volet des pérégrinations de l’inspecteur Huldar et de la psychologue Freyja. Quand on les découvre dans cette histoire, leurs relations sont très tendues à cause des dommages collatéraux exposés dans « ADN » (Babel Noir n° 221). En fait, ils ont été rétrogradés à des postes qui sont autant de voies de garage et, de plus, ils subissent les sarcasmes et les attitudes dénigrantes de leurs collègues.
Double pitch
C’est un double pitch qui lance l’histoire. Primo, en 2004, une petite fille disparaît mystérieusement alors qu’elle attendait son père devant son école. Deusio, lors de l’ouverture d’un cylindre temporel réalisé par les écoliers de ce même établissement en 2006, on découvre un message étrange qui annonce qu’en cette année 2016, des personnes désignées par des initiales seront tuées. Suivi de « Personne ne les regrettera. Surtout pas moi. Je suis très impatient ». Cela fait désordre parmi les autres lettres consacrées au thème « A quoi ressemblera l’Islande dans 10 ans ? ». Huldar est chargé d’enquêter sur le sujet, mais il le traite avec une certaine désinvolture au début. Quand ses recherches lui font découvrir deux mains tranchées sur la propriété d’une personne à interroger, la cadence s’accélère. Alors qu’il cherche à qui appartenaient les mains, d’autres crimes très élaborés et particulièrement cruels s’enchaînent. Assez rapidement, il établit la relation entre ces actes criminels et la fameuse lettre de la capsule temporelle. A partir de ce point, l’auteure va nous immerger dans une enquête subtilement agencée.
Dans la veine du polar nordique
Comme toujours dans ce type de roman, les personnages foisonnent et sont autant de pistes potentielles dont beaucoup sont destinées à vous égarer et à remettre en question votre perspicacité. Le style d’Yrsa Sigurdardottir est fluide, sans fioritures, presque clinique. Bien dans la veine du polar nordique, il m’a aussi fait penser à la démarche de Jussi Adler Olsen en ce sens que le fonctionnement de la société islandaise est exposé sans ménagement, avec son lot de critiques acerbes. Par exemple, l’accès à des logements corrects n’est apparemment pas le côté le plus reluisant du pays. Personnellement, je n’ai pas su me détacher de la lecture de cette histoire habilement construite et dotée d’une réelle profondeur. C’est un roman que je peux recommander très chaudement. J’en veux pour preuve que j’ai acheté ADN très rapidement après avoir fermé ce livre. Je vous en parlerai dans une prochaine chronique. Sachez également que le troisième volet du duo Huldar/Freyja est déjà disponible dans la collection Actes Sud (Absolution, 2020).