Honky Tonk Samouraïs

Lansdale, Joe R.; Trad. de l’anglais (États-Unis) par Frédéric Brument
Policier & Thriller
Paris : Denoël, 2018, 416 pages, 22.50 € (Coll. Sueurs Froides)

🙂 🙂 🙂 Mousquetaires délurés

Dans son acceptation de base, « Honky tonk » désigne une courant de musique countryet, par extension, les bars du sud des États-Unis dans lesquels elle est jouée. Si l’on creuse un peu, notamment sur le site « Urban Dictionnary », le terme désigne aussi « a good time involving good music, beer, and good friends », soit du bon temps, incluant de la bonne musique, de la bière et de bons amis. Pour ce qui est de la bière, il y a longtemps que Léonard et Hap y ont renoncé. Comme Robicheaux, le personnage-fétiche de James Lee Burke, ils sont tous les deux passés au Dr Pepper et au Coca light. Par contre, question « bons amis », les deux compères se défendent, l’amitiéqui les lie depuis le début de leurs aventures (1990 aux États-Unis, 1999 en France)confinant à une véritable et indéfectible fraternité. Ils se chamaillent régulièrement et s’offusquent de leurs défauts respectifs, mais Len donnerait sa vie pour Hap et réciproquement.

Détectives privés pour de vrai

S’ils ont souvent exercé le boulot de détective privé, c’était chaque fois en free-lance, sans licence et dans la simple idée de rendre service à une de leurs connaissances. Cette fois, l’enquête dans laquelle ils vont se lancer sera, au moins dans un premier temps, frappée du sceau de la légalité puisque les voilà engagés comme détective privés dans l’agence que la propre compagne de Hap dirige depuis peu. Sur papier, le marché est simple : il s’agit de retrouver une jeune femme, petite-fille de Lily Bruckner, une grand-mère au vert langage et ne disposant que de très peu de moyens financiers. Les premières démarches de Hap et Len vont les conduire à une concession de voitures d’occasion de luxe, dans lequel la jeune femme travaillait avant de disparaître. Dès leur première visite, les deux privés prennent connaissance d’un vaste catalogue de véhicules disponibles. Sur chaque photo figure, en plus de la voiture, une charmante jeune demoiselle en tenue légère.

Polar déjanté au langage fleuri

Ainsi, au départ d’une enquête sur une personne disparue, Hap et Len vont-ils se retrouver mêlés à des affaires de crime organisé, impliquant trafic d’êtres humains, blanchiment d’argent, trafic d’armes et tueurs en sérieà la cruauté inouïe. Au-delà de cette intrigue sans temps morts et où les scènes d’actionse révèlent à nouveau d’un réalisme, d’une crédibilité et d’une clarté irréprochable, le sel de cette nouvelle aventure réside cette fois encore dans le style de Lansdale. Imagée et riche, sa langue met comme aucune autre ses ressources au service des situations tantôt cocasses, tantôt absurdes ou dramatiques vécues par les deux héros. Voilà bien des aventures à déconseiller à ceux que la première grossièreté rebute ou aux amateurs exclusifs de récits policés dans lesquels pas un mot ne dépasse. Par contre, que ceux qui revivent à la lecture d’expressions fleuries, qui se régalent d’un usage du bon terme dans la bonne situation, fût-il d’une crudité rare, que ceux-là plongent dans l’univers résolument « honkytonkien »et non-politiquement correctdu grand Joe Lansdale.

Nicolas Fanuel

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