Le dernier magicien

Lindholm, Megan (alias Robin Hobb); traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Sylvie Denis
Fantasy
Saint-Laurent-d’Oingt : Mnémos, 2020, 267 pages, 20 € (Nouvelle édition) (Collection Icares)

🙂 Magie aux restos du coeur

Un homme erre chaque jour dans les rues de Seattle. Il n’a plus de passé, il n’a plus de nom, il ne se souvient de rien, il vit au jour le jour et s’efforce d’être en paix avec lui-même. Il est l’un des derniers magiciens, et possède le pouvoir de la Connaissance : par une simple phrase, il peut changer la vie des gens qui viennent vers lui. Mais une ombre grise et maléfique le poursuit et cherche à l’anéantir. Lui seul a la capacité de la combattre, afin de protéger Seattle. Mais pour cela, il doit vaincre ses propres démons et faire face à son passé oublié… (présentation de l’éditeur). 

Une retour inattendu

Publié en anglais en 1986 (en 2003 en français), Le dernier magicien de Megan Lindholm, plus connue sous le nom de plume Robin Hobb, n’était plus disponible depuis plusieurs années. Les fans de l’écrivaine seront certainement heureux de (re)découvrir ce roman éloigné de l’univers médiéval-fantastique de sa célèbre série, L’Assassin royal.

Fantasy urbaine et tableau social

C’est pourtant bien à de la fantasy que nous avons affaire ici. D’un genre particulier cependant puisque l’histoire prend place dans le Seattle de la fin du XXe siècle et suit la vie d’un vétéran de guerre devenu sans-abri. Si l’on découvre directement qu’il ne s’agit pas d’un homme ordinaire, puisqu’il se révèle être magicien, Lindholm n’inscrit pas son héros dans un contexte historique si précis pour rien. Au-delà de l’histoire relevant de la pure littérature de l’imaginaire, elle dépeint également le quotidien d’un homme vivant à la marge de la société, traumatisé par son passé militaire et en proie à des démons intérieurs qu’il peine à apprivoiser.

Un étrange mélange

En plus de cette lutte quotidienne contre la précarité, le magicien (on ne saura jamais son nom) tente de se dépêtrer d’une étrange entité maléfique qui tente de l’anéantir. Un double combat qui s’incarne dans deux femmes : Cassie, autre magicienne qui a initié le héros à la magie et l’aide dans son combat contre la force obscure et Lynda, jeune serveuse qui tente de l’extraire de la misère et de la rue. Ces deux visages, à l’image des enjeux qu’elles représentent, traversent le roman sans jamais vraiment se croiser. En résulte un étrange mélange des genres qui, pour être original, n’en demeure pas moins déroutant.

Un roman qui peine à démarrer

Le récit a beau s’accélérer significativement dans les toutes dernières pages et offrir une chute inattendue, l’ensemble peine à trouver son rythme. Une grosse partie du roman balade le lecteur de cafés en soupes populaires et aime s’attarder sur les considérations purement physiologiques du magicien. Si l’ensemble n’est pas désagréable, il donne tout de même l’impression de traîner inutilement. Les amateurs du Seigneur des anneaux aiment certainement le premier chapitre du roman racontant la fête d’anniversaire organisée pour les 111 ans de Bilbon (« Une réception longtemps attendue »). Ils seraient néanmoins plus mitigés sur l’ensemble de l’œuvre si celui-ci couvraient 90% du récit et que la quête de l’anneau tenait tout entière en quelques pages d’un chapitre intitulé « Et ce qu’il se passa ensuite ». C’est un peu l’impression dominante à la fin de ce Dernier magicien qui ne trouve pas, à nos yeux, un juste rythme entre les deux faces de son récit. L’aspect purement magique est ainsi reléguée au second plan et ne ressort finalement que pour un final, certes réussi, mais dont les enjeux auraient dû être développés bien en amont si bien que l’on se demande si le roman n’aurait pas été meilleur expurgé de toute sa dimension surnaturelle.
Réédition onéreuse
Les éditions Mnémos proposent un intéressant travail éditorial qui mêle rééditions de classiques, parfois introuvables, et publications de nouveautés. Si l’on peut évidemment les remercier de rendre ce roman à nouveau disponible, on peut tout de même s’interroger sur la pertinence de le ressortir en grand formatdans une version inchangée depuis sa première édition en 2003. Pourquoi ne pas l’avoir, par exemple, proposé dans leur excellente collection de poche « Hélios » ? Une réédition à prix fort réservée aux fans de l’autrice.
Nicolas Stetenfeld

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