Le mauvais chemin

Mikel Santiago; traduit de l’espagnol par Aline Valesco
Policier & Thriller
Actes Sud, 2018, 400 pages, 22.50 €

🙂 🙂 Seul contre tous

La Provence est une terre de prédilection pour les riches Anglo-américains, qu’ils soient hommes d’affaires en vacances, antiquaires en quête de bonnes affaires ou agents immobiliers spécialisés dans la revente de mas typiques aux compatriotes nouvellement arrivés. Écrivain à succès, Bert Amandale vient de s’y installer en compagnie de sa femme Miriam et de leur adolescente de fille, Britney.

L’idée -surtout celle de Miriam en tous cas- en s’installant en Provence était de permettre à Bert de décrocher de l’ambiance new-yorkaise, des drogues et des alcools à portée de main, des mauvais amis toujours tentateurs, bref, de booster l’inspiration de son écrivain de mari et de permettre à leur couple de sortir de la dangereuse ornière dans laquelle la vie citadine américaine les avait poussés. L’arrivée impromptue dans leur village de Chucks Basil, un rockeur sur le déclin et abonnés aux excès en tous genres, meilleur ami de Bert mais également le plus détesté par Miriam, va jeter un froid sur leurs projets.

Fidèle à ses habitudes, Chucks ne tardera pas à entraîner Bert dans une histoire abracadabrante, amorcée par un inconnu qu’il aurait renversé de nuit, et mort ses bras non sans lui avoir décroché un message incompréhensible. Faut-il le préciser? Le corps de l’inconnu ne sera jamais retrouvé. Police, amis et connaissances, tout le monde s’accorde pour mettre l’histoire sur le compte d’une consommation excessive d’alcool, tous sauf Bert, indéfectible ami et soutien de Chucks. À eux deux, ils vont tenter de remonter la piste de l’inconnu et de comprendre son message, au risque de troubler l’apparente tranquillité provençale.

Après « Dernière nuit à Tremore Beach », dont nous vous avions dit le plus grand bien à sa sortie en 2016, revoici Mikel Santiago, l’auteur espagnol qui ne situe pas ses intrigues en Espagne. Cette fois, c’est à un écrivain et non pas à un musicien en panne d’inspiration que nous devons d’être entraînés dans une étrange aventure et, si la musique reste bien présente, la bande-son se révèle plus rock’n’roll (le musicien de « Dernière nuit… » était adepte de classique) et cadre parfaitement avec les démêlés de Bert en terre française. L’intrigue, au lieu de flirter avec le fantastique, emprunte plutôt les chemins du complot auquel on ne peut s’attaquer qu’en se faisant d’abord passer pour parano, drogué, alcoolique ou dépressif, toutes qualités allègrement réunies chez notre écrivain new-yorkais. En cela, ce deuxième opus acquiert une certaine ascendance hitchcockienne, mâtinée d’un petit air du « Fugitif », le dynamisme échevelé en moins. Car si Bert doute et enquête, il le fait à son rythme. Freiné par les reproches de sa femme et les aventures sentimentales de sa fille, il se laisse mener par un flot d’évènements auxquels il ne peut pas grand-chose au point que l’on souhaiterait parfois lui ficher un petit coup de pied au derrière. Quelques lenteurs donc, dans une intrigue qui nous semble moins maîtrisée et moins originale mais qui se lit sans déplaisir, rehaussée par des pointes d’humour ironique de très bon aloi.

Nicolas Fanuel

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