Gendron, Sébastien
Policier & Thriller
Paris : Gallimard, 2025, 336 pages, 20 €

🙂 🙂 🙂 Un mystérieux serpent

Hippolyte, 5 ans, sort par tous les trous de sa mère, Constance. Ce gosse, elle ne l’a jamais aimé et le fait qu’elle l’ait conçu avec ce sale type de Damien reste la plus grande erreur de son existence. À lire les quelques exemples du comportement du gamin, oui, on témoigne en faveur de la dame, Hippolyte n’est pas précisément un sale gosse, c’est un être humain imbuvable, profondément égoïste et mauvais qui mérite juste qu’on l’abandonne. À l’image de son père. Les abandonner, c’est exactement ce que Constance compte faire. Bangalore, en Inde, ça y est, elle a son billet. Elle laissera le petit ange et son père derrière elle, sans aucune chance pour eux de la retrouver. Mais le sort en décide autrement, qui enlève le cher Damien, d’un coup d’accident vasculaire, à la rare affection des siens. Coincée avec son monstrueux rejeton, Constance va ronger son frein. Ce qu’elle ignore, c’est la présence, quelques maisons plus loin, d’un nouvel habitant du quartier, un certain Lucas Daux, vraiment pas un cadeau pour ceux qu’il pointe dans son viseur, mais qui, contre toute attente, va peut-être permettre à Constance de lever les voiles vers Bangalore…

Drôlerie vacharde

Le dernier roman de Sébastien Gendron, « Python », s’affiche comme la deuxième partie d’un cycle entamé avec « Chevreuil », également paru dans La Noire en 2024. Les liens entre les deux textes restent à ce stade mystérieux, il est notamment question d’un parc animalier révolutionnaire qui, le jour de son ouverture officielle, va en quelque sorte se retourner contre ses visiteurs. On note aussi, si on est un rien observateur, des personnages communs aux deux intrigues. Toute cela devrait se dénouer, croit-on comprendre, dans le prochain volume en gestation. À l’inverse de « Chevreuil » qui se déroulait dans la campagne profonde, « Python » a pour cadre un quartier périphérique d’une ville française qui ressemble à ces fameux « suburbs » américains. Un quartier où tout le monde se connaît et feint de s’apprécier, tout en menant une petite vie tranquille, respectueuse des règles de la bienséance et…du règlement signé par chaque habitant. Le regard permanent et réciproque des uns et des autres sur leurs agissements, leurs jugements et conseils sur le moindre aspect de leurs quotidiens, Gendron en joue allègrement, et les scènes de vie de quartier sont autant de moments d’échanges verbaux enlevés et délicieusement politiquement incorrects. Politiquement incorrecte, toute l’intrigue l’est au fond, à commencer par le personnage d’Hyppolite, adulte haïssable miniature, et par celui de sa mère, dépourvue -et c’est sans doute pour certains beaucoup plus choquant- de tout sentiment maternel. Le duo se mue en trio avec l’arrivée de Lucas Daux, un monstre de froideur calculatrice et d’insensibilité psychopathique, qui va booster l’intrigue pour l’emmener vers des sommets de drôlerie vacharde et de cruauté parfois effrayante. Gendron en profite pour dézinguer à tout va les côtés neuneu et l’hypocrisie dominante de ce début de siècle, son intrigue pétarade, on ne s’ennuie pas une minute, on se réjouit même souvent de pouvoir lire encore de la littérature noire et comique made in France. Quant au pourquoi du titre, on vous laisse le découvrir. C’est vache hein ?
Nicolas Fanuel

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