Immobilité

Evenson, Brian ; traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Jonathan Baillehache
Science-fiction
Paris : Rivages, 2023, 269 pages, 22 €

🙂 Apocalypse en terrain connu

Lorsque vous ouvrez les yeux, vous ne savez plus qui vous êtes ni d’où vous venez. Vous savez que le monde a changé, qu’une catastrophe a détruit tout ce qui existait, et que vous êtes paralysé à partir de la taille. Un individu prétendant être votre ami vous dit que vos services sont requis. Vous voici donc transporté à travers un paysage de ruines, sur le dos de deux hommes en combinaison de protection, vers quelque chose que vous ne comprenez pas et qui pourrait bien finir par vous tuer. Bienvenue dans la vie de Josef Horkaï. (présentation de l’éditeur)

Nouvelle collection chez Rivages

Depuis quelques années, les littératures de l’imaginaire semblent avoir à nouveau le vent en poupe. En témoigne la multiplication des collections spécialisées qui lui sont consacrées. Petite dernière dans le paysage éditorial français, Rivages/imaginaire voit les très respectables éditions Rivages, surtout connues pour leurs collections policières, renouer avec ce pan de la littérature mis à l’écart depuis près de 20 ans. Présentée comme une collection tournée vers la science-fiction dans toute sa diversité et, surtout, son originalité, elle a proposé, en guise de premier titre, un roman phénomène du chinois Qiufan Chen : L’île de Silicium. Pour sa deuxième livraison, l’éditeur se tourne vers un roman d’un auteur nord-américain méconnu, Brian Evenson, dans un sous-genre particulièrement fécond : le récit post-apocalyptique. Reste à voir si ce Immobilité parvient à tirer son épingle du jeu.

Une mise en place convenue…

L’entame du roman n’est en cela pas rassurante tant l’auteur multiplie les motifs les plus convenus de la science-fiction post-apocalyptique (apocalypse mystérieuse, monde désertifié, humanité en berne, violence généralisée, retour d’une religiosité sectaire…) et use d’artifices narratifs totalement éculés (l’amnésie du personnage principal). L’aura de mystère qui plane tout au long du roman semble en cela quelque peu artificielle. Le lecteur attentif identifiera par ailleurs assez rapidement les tenants et aboutissants d’une histoire dans laquelle le malheureux personnage principal, affublé de cette handicapante mais bien à propos amnésie, fait parfois preuve d’une exaspérante naïveté.

… Et une suite du même niveau.

Si l’efficacité de la narration et des dialogues permet tout de même de passer un agréable moment de lecture, on ne peut que regretter le manque général d’originalité. L’amateur du genre risque de ne pas y trouver son compte. En reste un univers justement campé où l’auteur ne s’attarde pas à d’excessives explications, une noirceur désabusée aux accents beckettiens totalement assumée et quelques bonnes idées de science-fiction. Le tout sauve le roman mais n’en fait malheureusement qu’un récit parmi d’autres dans un genre où la concurrence, rude, exige un peu plus d’ambitions pour pouvoir tirer son épingle du jeu.

Conclusion

Pour ce deuxième essai, la collection des éditions Rivages ne convainc pas totalement avec un récit certes tout à fait lisible mais présentant un réel manque d’identité. Au vu du parcours exemplaire de cette maison d’éditions, restons attentif à la suite, elle risque de nous réserver de belles surprises !
Nicolas Stetenfeld

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