Le chasseur de lapins

Kepler, Lars ; traduit du suédois par Lena Grumbach
Policier & Thriller
Actes Sud, 2018, 566 pages, (Collection Actes Noirs), 23.80 €

🙂 🙂 Pauvres lapins

D’abord, les autorités ont cru à un acte terroriste. Il faut bien reconnaître qu’assassiner le Ministre des Affaires étrangères suédois de cette façon quasi-rituelle et en tous cas sauvage, ça ne laisse penser ni à un crime passionnel, ni à un cambriolage qui aurait mal tourné. Le ministre profitait effectivement de l’absence de sa femme pour occuper sadiquement sa soirée avec un jeune demoiselle, certes professionnelle, mais qui ne s’attendait pas à de tels extrêmes de la part de son client. Fait bizarre, la jeune femme avait été laissée en vie par le tueur. L’enquête est confiée à la Sureté de l’état qui, croyant à la piste terroriste, fait appel à un ancien policier, Joona Linna, incarcéré au moment des faits et qui pourrait donc entrer facilement en contact avec un autre prisonnier soupçonné d’être la tête pensante de l’assassinat. Une course contre la montre s’engage, le tueur ayant laissé entendre à la prostituée que d’autres victimes allaient tomber sous ses coups prochainement.

 

D’une efficacité redoutable, Kepler nous entraîne dès les premières lignes au cœur de son intrigue comme le ferait une lame de fond d’un radeau de fortune. Impossible de résister à l’épaisseur du mystère qu’il met en place ou d’imaginer vers quel dénouement il nous entraîne avant la bonne moitié du roman. Les éléments permettant une véritable résolution ne se dévoilent effectivement qu’avec parcimonie alors que les fausses pistes convergent presque trop joliment vers un drame inévitable. Il faudra toute l’attention des deux principaux policiers en charge de l’enquête -le fameux Joona et son indestructible collègue Saga Bauer- pour démêler le vrai du faux. Au-delà de ces qualités indéniables, l’ensemble du roman souffre néanmoins d’un style d’un sécheresse absolue, un genre de non-style aisément reconnaissable et d’une fâcheuse tendance de l’auteur à l’étirement en longueur. Au-delà du cap de la moitié des 566 pages que comptent l’intrigue, bien peu de pièces manquent à l’esprit du lecteur attentif, ce qui donne un côté artificiel aux derniers rebondissements. Quant aux personnages, c’est bizarrement aux seconds rôles ou aux méchants de service que Kepler arrive à donner le plus d’épaisseur ; les flics, trop lisses malgré ses efforts pour les doter d’une vie privée inhabituelle, ne marquant finalement que très peu la mémoire. Efficace et divertissant donc.

Nicolas Fanuel

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