Les mille crimes de Ming Tsu

Lin, Tom ; traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Doug Headline
Policier & Thriller
Paris : Gallimard, 2023, 416 pages, 24 € (La Noire)

🙂 🙂 🙂 🙂 Le monde se divise en deux catégories

Dans les années 1860-1870, ce sont des immigrés chinois qui construisent la voie ferrée pour la Central Pacific. Ming Tsu est l’un d’eux, orphelin formé par son père adoptif américain à l’art de tuer. Pour retrouver Ada, l’épouse blanche que les hommes de main de son beau-père lui ont enlevée, il va traverser l’Utah, le Nevada et la Californie en fugitif dont la tête est mise à prix. En cours de route, il exécute chacun des hommes qui lui ont « volé sa vie ». (Résumé de l’éditeur)

Une aventure brûlante

Roman noir, western et aventure mystérieuse tintée de fantastique, Les milles crimes de Ming Tsu est une épopée grandiose et dynamitée qui vous plonge au cœur d’un homme rongé par la rage. D’une grande qualité littéraire, ce roman de Tom Lin dépeint avec beaucoup de réalisme les grandes étendues américaines au point d’élever le désert au rang de personnage le plus passionnant de l’histoire. Ce dernier est brossé avec un talent tout particulier et l’effet sur le lecteur est saisissant. On y ressent le moindre grain de sable, l’inhospitalité du milieu, la mort qui rode derrière chaque dune, la chaleur étouffante en pleine après-midi et le froid insistant qui monte dès la nuit tombée. Le tout apparait comme une entité organique et vivante, dotée parfois d’une conscience propre, et malheureusement rarement bien intentionnée – dans un jeu de miroir assez réussi avec le protagoniste lui-même.

Chimère littéraire

Ce voyage est l’occasion pour l’auteur de mélanger les genres, et d’en jouer. En effet, le fantastique s’invite assez rapidement dans le récit. D’abords timidement par le personnage du Prophète, qui pourrait voir l’avenir et connaitre combien de temps il vous reste à vivre, qu’on y croie ou non. Un choix qui, à l’instar des personnages du roman, est laissé libre au lecteur. Puis de façon beaucoup plus assumée avec une troupe deFreaks dotés de pouvoirs particuliers. Pouvoirs qui auront leur importance dans le déroulement de la narration bien que secondaire dans le récit, on sent que l’auteur s’est bien amusé à créer ces personnages étranges.

Beignes, marrons et châtaignes

Les milles crimes de Ming Tsu, c’est aussi et avant tout un roman noir et violent. Bien que rien ne soit gratuit le livre est parsemé de chair putréfiée, de coups de chevrotine, de nez cassés ou de crânes ouverts. Un joyeux bestiaire sanglant que l’auteur s’efforce de décrire au plus juste et qui vous fera peut-être grincer des dents, mais qui participe à l’esthétique du roman. Une esthétique dure, froide et violente – à l’image du désert – parfois interrompue par un moment réconfortant d’amour ou de fraternité que vous apprendrez à apprécier à sa juste valeur.
Julien Neven

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