Moïra, une jeune ingénieure française spécialisée dans les nouvelles technologies est recrutée par la société Ming, basée à Hong-Kong, pour travailler sur un projet ambitieux d’application conversationnelle (chatbot) ultra perfectionnée : DEUS. Elle est chargée de l’humaniser en lui conférant plus de personnalité et de sensibilité pour que ce programme puisse être un véritable interlocuteur et, à terme, devenir indispensable à tout un chacun.
Très vite, les morts violentes et suicides suspects s’enchaînent au sein des employés de l’entreprise. Moïra, dernière recrue de la société est approchée par la police pour devenir une taupe au sein d’un système qui n’a décidément rien de net. Mais comment effectuer des recherches sur ce qui se trame au travail lorsque l’on est surveillé, analysé et enregistré en permanence ?
La vie privée existe t-elle encore ?
Des ordinateurs avec qui discuter et qui vous guident dans vos décisions, des montres connectées qui analysent votre sommeil, votre activité cardiaque ou votre stress, des téléphones qui vous localisent et vous enregistrent en permanence, des moteurs de recherche qui gardent en mémoire absolument chacune de vos requêtes … Nul doute que ce roman nous force à remettre en question l’omniprésence des applications technologiques dans notre quotidien. On aimerait penser qu’il s’agit là d’une fiction d’anticipation mais il suffit de regarder autour de soi pour réaliser l’ampleur du phénomène d’addiction aux technologies et la course acharnée des grandes entreprises pour conquérir le marché des assistants conversationnels (aussi nommés Chatbots) tel Siri ou Google Assistant (réagissant en permanence au fameux « OK Google »).
Peu de surprises mais de l’anxiété
Comme toujours dans les romans de Bernard Minier, le style est limpide et agréable à lire. Toutefois, à force de décrire le monde des technologies en utilisant à outrance le jargon de l’informatique, l’intrigue se noie dans le récit. En effet, il faut attendre la 120ème page pour que débute timidement l’enquête policière. Tout ce qui a trait à Ming ou à DEUS est détaillé et passionné, l’intrigue quant à elle est foncièrement simpliste et les indices semés ici et là sont tellement gros que le lecteur a vite fait de résoudre l’enquête. Aucune surprise, il ne reste qu’un petit goût de déception face à un roman policier somme toute banal.
Tout le potentiel de ce roman réside dans la description précise et anxiogène de l’impact des nouvelles technologies sur nos vies. Technologies pas si nouvelles que ça d’ailleurs, comme le rappelle l’auteur, car en 2007, Eric Schmidt, P-DG de Google déclarait : « La plupart des gens ne souhaitent pas que Google réponde à leurs questions. Ils veulent que Google leur dise quelle est la prochaine action qu’ils devraient faire. » Ce n’est donc que la prochaine étape, comme le décrit bien Bernard Minier.