Schulman, Sarah ; traduit de l’anglais (USA) par Maxime Berrée
Policier & Thriller
Paris : Inculte, 2021, 300 pages, 19.90 € (Collection Noir)
🙂 🙂 Les cercles du désespoir
New York, 2017. Trump vient d’être élu et la plupart de ses déclarations pétrifient déjà la moitié des américains. Ancienne flic, droguée et alcoolique repentie, Maggie Terry ne se remet pas de sa rupture avec Frances et surtout de l’interdiction qui la frappe de voir leur fille Aline : « pourquoi Frances ne voyait-elle pas que l’absence de sa fille confinait Maggie dans les cercles du désespoir ? ». Les cercles dudésespoir, voilà comment aurait également pu s’intituler ce roman qui, quelles que soient les strates inextricablement entremêlées de l’existence de Maggie qu’il aborde, ne laisse à celle-ci d’autre solution que le passage du temps pour espérer panser ses blessures.
Alcooliques anonymes
Engagée comme détective privée par un avocat aussi psychologiquement affecté qu’elle, Maggie se voit confier l’affaire du meurtre d’une jeune actrice, visiblement harcelée sexuellement par un père dérangé. Déjà, le désespoir. Coachée par un collègue qui ne voit d’abord en elle qu’une droguée prête à sombrer, Maggie ponctue ses journées par la participation à de très nombreuses réunions des Alcooliques anonymes. À toute heure du jour, en n’importe quel quartier de la ville, il y a toujours une séance à laquelle participer. Entendre les aveux d’hommes et de femmes au moins aussi désespérés qu’elle. Les regarder, voir leur déchéance physique et psychologique. Les douze étapes. Compulsivement. Le désespoir encore. On ne peut s’empêcher de penser au « Huit mille façons de mourir » de Lawrence Block, roman dans lequel son privé, Matt Scudder, ponctuait également son enquête par ces réunions des A.A.
Permanente introspection
À l’inverse de Scudder, Maggie ne développe qu’une propension limitée à l’humour caustique. Cheminer à ses côtés, suivre les affres du processus d’introspection permanente qu’elle mène se révèle parfois éprouvant et long, d’autant que le versant « enquête policière » de l’intrigue va en s’amenuisant. Au-delà de son affaire d’actrice assassinée, la véritable quête de Maggie se résume au prénom de sa fille. La revoir à tout prix. Ne plus être privée d’elle. Mais son ex n’entend rien lâcher et sur le chemin de l’ex-flic du NYPD, les tentations sont nombreuses et toutes plus aguichantes : whisky, cocktail, rail de coke. Le désespoir toujours. Comme le dit Maggie elle-même, tout ça, ce bordel, Trump le dingue, le fils de son ex-collègue qui se suicide, Frances qui la quitte et cette actrice assassinée : « la source de tout le mal de ce monde : les gens qui ne savaient pas résoudre leurs problèmes ». On veut bien la croire.