Le sang du Mississippi

Iles, Greg; traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Aurélie Tronchet
Policier & Thriller
Paris : Actes sud, 2019, 841 pages, 26.50 €

🙂 🙂 🙂 Un procès sous tension

Après « Brasier noir » et « L’arbre aux morts », Greg Iles nous offre ici la conclusion de sa trilogie consacrée à la lutte sans merci entre Penn Cage, ancien procureur et actuel maire de Natchez, et un groupe dissident du KKK, les Aigles Bicéphales.
Aussi haletant que ses deux prédécesseurs, « Le sang du Mississippi » s’en démarque pourtant largement parce qu’il se concentre sur un événement majeur : le procès du père de Penn, accusé du meurtre de Viola Turner, son ancienne infirmière noire.

Un procès de plus de 800 pages

En remontant aux sources de son intrigue (« Brasier noir » s’ouvrait avec la mise en accusation de Tom Cage, le père du maire), Greg Iles clôt logiquement son cycle romanesque tout en s’offrant une incursion vers un genre qui a fait les grandes heures du cinéma made in USA : les films de prétoire. Loin de s’engluer dans de longues tirades juridiques ou d’abuser d’un vocabulaire technique, Iles s’emploie à insuffler une tension extrême tout au long du volume, en recourant à des procédés narratifs originaux (coincé chez lui, Penn suit le début du procès via des sms qu’un ami avocat lui envoie) et en diversifiant les thèmes abordés. Afin de présenter la personnalité de Tom Cage dans toute sa complexité, son avocat va user de moyens qui donneront des sueurs froides à toute la famille du vieil homme, allant jusqu’à rester sans réaction lorsque le procureur assénera des contre-vérités flagrantes. Même si elle se fera attendre, la réplique se révèlera dévastatrice et, en explorant l’histoire de Tom Cage, c’est finalement l’histoire récente des États-Unis que Iles nous restitue. À cet égard, les pages consacrées à la Guerre de Corée, moins connue que le Vietnam et à laquelle l’accusé prit part, se révèleront d’une rare puissance évocatrice.

La famille, c’est tout ce qui compte

Au fil de l’avancée du procès, les liens entre Penn et sa famille vont évoluer, se distendre pour finir par se resserrer, parce que finalement, « la famille, c’est tout ce qui compte ». Greg Iles creusera notamment les liens du sang au travers du rapport père-fils, en mettant en scène des moments d’apogée de sincérité entre Penn et Tom, deux hommes qui choisissent de délaisser tout rapport d’autorité pour privilégier une relation sans jugement, faite de compréhension et de complicité et d’ainsi faire place à une amitié adulte.
Comme dans un film de Michaël Mann
Au-delà de l’attention portée à la psychologie des personnages, Greg Iles ponctue le procès par des scènes d’actions inattendues et fulgurantes. Aussi rares que dans un film de Michaël Mann, elles en acquièrent, comme chez le cinéaste américain, une force de frappe impressionnante. La lutte entre les Aigles Bicéphales, alliés à un gang de motards trafiquants de drogue, et le clan Cage restera violente et d’une terrible cruautéjusqu’à la fin, accentuant encore si besoin était l’ambiance de conflit éternel entre le bien et le mal dans lequel baignent ces trois formidables volumes.
Nicolas Fanuel

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