Manzini, Antonio ; traduit de l’italien par Samuel Sfez
Policier & Thriller
Paris : Denoël, 2022, 413 pages, 23,90 €
🙂 🙂 🙂 Coïncidence glaçante
(Quatrième de couverture) : « Au cœur de la froide vallée d’Aoste, nichée dans le nord de l’Italie, le cadavre d’une femme transgenre est retrouvé, sillonné d’étranges traces de corde. Rocco Schavione, vice-préfet râleur, macho et doté d’un humour cinglant est dépêché sur place. Alors que les difficultés d’identification de la victime empêchent l’enquête de progresser, la police tombe sur un autre cadavre, à Rome cette fois. Le rapport avec Schavione ? Aucun, si ce n’est que le mort a dans la poche un papier sur lequel est inscrit le numéro de téléphone du vice-préfet ».
Premier contact avec la prose d’Antonio Manzini centrée sur le personnage du vice-préfet Rocco Schavione. Bien que ce soit le septième tome de la série (si l’on compte un recueil de nouvelles non traduit à ce jour), cela ne m’a pas posé de problème tant les évènements importants de ses précédentes aventures sont distillés au fil de l’histoire.
Un homme sensible et meurtri
Romain d’origine, Rocco Schavione a été muté dans le val d’Aoste dont il déteste rapidement le climat rude, gris et pluvieux, sans parler de la neige. Il est bougon, râleur, rustre, sarcastique et même malpoli. Ses sautes d’humeur ne le rendent pas forcément sympathique. Malgré tout, le personnage est attachant, car, on devine que derrière cette carapace se cache un homme sensible et meurtri.
Il est aussi irrespectueux des règles et de sa hiérarchie, fume des joints à la fenêtre de son bureau et est toujours accompagné de sa petite chienne Lupa. Dans la solitude de son appartement, il entame très souvent des dialogues avec son épouse Marina qui, on le devinera, est décédée quelques années auparavant dans des circonstance troubles. Rocco a le parfait profil du anti-héros, en fait.
Cependant, une autre de ses caractéristiques est son taux d’efficacité exceptionnel dans la résolution d’affaires criminelles, malgré ses méthodes rarement orthodoxes. Alors qu’il enquête sur un premier meurtre à Aoste, un deuxième, à Rome cette fois, va l’emmener hors de sa juridiction car il y voit un lien avec des évènements antérieurs, ceux-là mêmes qui ont bousculé sa vie.
Du polar et des sujets graves
Le style d’Antonio Manzini est fluide. Le récit est solide et bien agencé. Il insère parfois des expressions en italien, malheureusement non-traduites et pas toujours compréhensibles (contrairement à ce que faisait Andrea Camilleri par le biais de la traduction). Bon, j’avais dit que je ne comparerais pas mais c’est impossible. En effet, les amateurs du commissaire Montalbano trouveront leur bonheur avec Rocco Schavione. Si le climat « chaud » de la Sicile se reflète chez Camilleri, celui nettement plus frais des Alpes italiennes donne une autre ambiance au récit. Je le redis, le personnage central est tout autant attachant, surtout parce que son passé trouble le hante davantage. Comme l’écrivain sicilien, Antonio Manzini aborde des sujets graves comme la défense du mouvement LGBT ou la corruption au sein de la justice italienne, entre autres.
Étant une inconditionnelle d’Andrea Camilleri, ce n’était pas gagné pour moi, surtout que Manzini est depuis longtemps présenté comme le digne héritier de ce dernier. Notez qu’il a plusieurs cordes à son arc, puisque que, en plus d’être écrivain, il est tout aussi plébiscité comme acteur, réalisateur et scénariste pour le cinéma et la télévision. Mais j’ai vraiment beaucoup apprécié ce roman et je compte bien faire la chasse aux précédents tomes. Oui, il a fait mouche …