L’inconnu de la forêt

Coben, Harlan ; traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Roxane Azimi
Policier & Thriller
Paris : Belfond, 2020, 428 pages, 21,90 €

🙁 Mowgli détective

Naomi Prine, une adolescente harcelée à l’école, disparaît. Matthew, un de ses congénères, culpabilise de n’être jamais intervenu pour la tirer d’affaire, et s’inquiète de sa disparition. Il est bien le seul : la situation familiale de Naomi n’est pas rose.
Matthew charge sa grand-mère, Hester Crimstein, de retrouver la jeune fille. Hester est une avocate pénaliste, médiatisée et disposant de moyens pour mener ses enquêtes. L’affaire Naomi lui laisse penser qu’elle ferait bien d’appeler Wilde à la rescousse. Wilde vit en marge de la communauté de Westville, New Jersey. Wilde est le fils adoptif de la famille Crimstein. Enfant, il a été trouvé dans la forêt, sans qu’on ne puisse l’identifier ni connaître ses origines. Wilde dispose de ses propres méthodes et de son propre réseau pour enquêter sur la disparition de Naomi.
Bientôt, c’est un autre ado qui disparaît, le fils d’un producteur TV très en vue de la région.

Polar surfait

Harlan Coben, c’est, se dit-on, un suspense bien rodé, au bout de 32 romans policiers. Et le quatrième de couverture vous met tout de suite dans l’ambiance « thriller ».
Pas mal d’ingrédients saupoudrent ce nouveau titre : la disparition, un thème cher à l’auteur, les secrets de famille, le business et la politique, parfois entremêlés. Coben veut avec « L’inconnu de la forêt » dénoncer les dérives des réseaux sociaux et d’un système pénal qui condamne des innocents via le métier (et le show télévisé) d’Hester. Entreprise certes louable.
Le thème de l’enfant trouvé est exploité sous un angle a priori original : 30 ans plus tard, qu’est devenu celui qu’on a dénommé « Wilde » ? Harlan Coben jouant sur plusieurs tableaux, il ne développe guère le « cas Wilde », dont la découverte en 1986 faisait l’objet d’une préface. Le livre s’achèvera avec un mystère resté entier.

Thématiques décevantes au final

La thématique de l’enfant sauvage est certes romanesque, mais force est de constater que Wilde m’a déplu. Il est bel homme (et couche d’ailleurs avec plusieurs femmes du coin en manque d’affection) et dispose soi-disant de moyens propres et inhabituels pour mener ses enquêtes. Difficile pourtant d’apprécier sa plus-value, à part des disponibilités dont ne dispose pas Hester et le fait qu’il mette en confiance (ses partenaires affectives en premier). Plus que Wilde, j’aurais aimé suivre les pas d’Hester et de son fidèle chauffeur originaire des Balkans. En termes d’enquêtes peu orthodoxes, lui aurait pu tirer son épingle du jeu et former avec la pénaliste un beau duo. Peut-être est-ce le cas par ailleurs car il semblerait qu’Hester revienne épisodiquement dans les romans d’Harlan Coben.
Le harcèlement scolaire n’est également qu’un prétexte et n’est guère exploité. On n’attend certes pas une moralisation systématique de ce-qui-n-est-pas-bien, mais un embryon d’état d’âme aurait été le bienvenu. A la fin du livre, on a presque l’impression qu’être le bouc émissaire a finalement été la chance de Naomi.  Ne subsistent au final que secrets et mensonges. Certes, l’auteur s’autorise à nous mener où il le souhaite, et pas forcément là où débute le chemin. Mais son intrigue peine à garder notre intérêt, donnant plutôt l’impression de partir dans tous les sens, sans réelle profondeur et ponctuée de dialogues insipides.
On en attendait plus d’un « maître du suspense »« Un inconnu dans la forêt » fera passer un bon moment à pas mal de monde, mais décevra sans doute un lectorat un peu exigeant.
Barbara Mazuin

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